OUATE ET VERRE

OUATE ET VERRE

28.2.13

jusqu'à la ceinture

NEIGENEIGENEIGENEIGENEIGENEIGE

j'étais jusqu'aux genoux
dans la big congère
j'étais juste con,
et j'essayais d'avancer

NEIGENEIGENEIGENEIGENEIGENEIGE

marche ou crève
de froid, de blanc
j'étais jusqu'aux genoux 
dans la big congère 

NEIGENEIGENEIGENEIGENEIGENEIGE

j'étais juste con
et j'essayais d'avancer
quand c'putain d'hiver 
m'a avalée 

NEIGENEIGENEIGENEIGENEIGENEIGE

c'est que la neige
a gagné


25.2.13

mon naufrage, c'est de la vieillesse

c'est fou
ce mal au cou
chuis à genou
bou hou bou hou

c'est fou
mon pauvre genou
n'est plus très mou
ouh ouh ouh ouh

c'est fou
mon naufrage où
tout est mildiou
pfiou pfiou pfiou pfiou

22.2.13

LES DENTS DE L'AMER

Pour le Défi du samedi :

Henri avait déjà décidé de prendre sa retraite quand le toubib lui dit que sa santé pouvait devenir fragile s’il continuait son boulot, alors il n’hésita pas à suivre les conseils Après tout, cela faisait trois cent soixante-six ans qu’il crachait le feu et il était bien temps que quelqu’un d’autre prenne la relève.
Ses écailles étaient encore verdâtres, sa queue longue et encore féroce, et une fois son boulot terminé, sa santé habituelle et monstrueuse fut vite rétablie. Il aimait bien rester au lit le matin au lieu de pointer dans la forêt pour incendier le chevalier occasionnel qui passait. C’était un point d’honneur chez la brigade, depuis cet acte terroriste du minable crétin qu’on appelait Saint Georges. Henri et ses copains montaient encore la garde, d’une vengeance fière meurtrière pour leur camarade tombé.
Maintenant, le matin, Henri avait le temps de prendre un deuxième café, parcourir Le Monde, faire les sodokus et téléphoner à sa tante Lucille pour prendre de ses nouvelles. L’après-midi, il jouait trois fois par semaine à la pétanque avec ses camarades Restif le Chimère et Ulysse la Licorne.
Récemment, Henri avait même décidé de remplir ses autres heures en faisant du free-lance…quelques barbecues ci et là, des fêtes d’anniversaire des gamins – cela leur changeait des trucs MacDo - et ainsi de suite. Henri aimait se sentir encore utile à la communauté et, en peu de temps, devint très demandé.
Un jour le téléphone sonna et Henri pensait tout de suite que sa tante Lucille avait eu un malaise. Mais la voix féminine à l’autre bout du fil n’était pas celle de sa tante bien-aimée. C’était une autre.
-          Allô, bonjour, Henri Crache-Flammes à l’appareil. Que puis-je pour vous ?
-          C’est vous le dragon ?
-          Lui-même, madame. Je vous écoute.
-          Ici, c’est Gwendolyn de Latour. J’ai un problème, je me demandais si vous pouviez m’aider ?
-          Je crois bien, répondit Henri. Dites-moi ce que vous voulez que je fasse.
-          Il vaudrait mieux que vous veniez voir pour vous-même.
Henri nota rapidement l’adresse et puis chercha son sacoche qui contenait son portable ; son permis d’intermittent ;  un manuel de secours, au cas où ; deux ou trois biscuits pour les chiens - fort utiles s’il fallait en distraire un ou deux, les chiens ne s’entendaient jamais avec les dragons, et les plus idiots se faisaient parfois rôtir devant les yeux de leur maîtresse horrifiée - et quelques pastilles pour la gorge, s’il avait un peu post-feu. Puis il se rendit au 587 rue de la Tour.
Il vit bien devant lui le grand escalier que Gwendolyn lui avait décrit, l’escalier que le gnome du village utilisait chaque nuit pour aller faire le voyeur à la fenêtre de cette demoiselle dans la grande tour. Normalement, Gwendolyn aurait aimé une telle attention masculine, mais le gnome était moche, hideusement poilu, et pas très friqué et Gwendolyn savait bien qu’elle pouvait mieux faire. Voilà pourquoi il fallait qu’Henri détruise l’escalier…afin que quelqu’un d’autre de plus agile et vaillant vienne admirer les atouts de sa jeune cliente.
Trois heures plus tard, et au trente-sixième essai, Henri avait déjà avalé toutes ses pastilles et deux des biscuits pour les chiens – ayant raté l’heure du thé – mais  il ne pouvait absolument plus essayer de faire fondre le fer de l’escalier. C’était trop résistant. Mais au lieu d’admettre qu’il n’était peut-être plus au niveau – après tout, il avait une réputation à protéger ! – il fouilla dans le manuel pour trouver une solution…Ah oui, le célèbre manœuvre légendaire… le Coup de Mâchoire…il ne l’avait jamais essayé, mais trouva que c’était bien le moment !
-          Et cha, ch’est quand j’ai déchidé de mordre dedans, expliqua ce pauvre Henri à son dentiste le lendemain matin.

l'escalier

19.2.13

Les maisons qui penchaient à droite

Pour Mil et une :


Chaim Soutine.  Les maisons.


Les maisons qui penchaient à droite, routine,
Regardaient toujours d’une horreur mutine
Le va-et-vient de leur houleuse voisine :
Cette mer fougueuse, et libertine.

Elles maudissaient ce qu’elle rapportait :
Du n’importe quoi - des saletés,
Des coquilles douteuses, de rudes galets.

Et donc, ces maisons faisaient leur tout
Pour qu’elle se casse la gueule sur le bout
De la rive qui protégeait leur ton du bon goût.

Et pourtant, tous les jours, la mer continuait,
Joyeuse, heureuse, à toujours les saluer.
Et les maisons qui penchaient à droite peinée
En restaient coïtes,  mais horrifiées
Par sa force, son énergie, et surtout,
Par son manque de rigidité impardonnable.

fauteuse

faux 
faux
faux
faux

faux-cul

faux-filet

faux-filant

faux-semblant

faux
faux
faux
faux

18.2.13

vulgarité

comme la lie
d'un pinard abominable
ça reste au fond du verre
qui se veut transparent

15.2.13

LE SUJET PARLE À CELLE QUI FERAIT SON PORTRAIT

Pour Un mot. Une image. Une citation.

Elle ne sait pas tout à fait pourquoi mon regard l'interpelle.

Suis-je un mendiant ou un simple homme pauvre qui vit en pêchant ses rares repas ?
Suis-je un escroc ou un rejet de la société ?

Mes cheveux et ma barbe sont blancs, mais peut-être que mon coeur est noir, on ne sait jamais et ces jours-ci on ne peut pas être trop prudent.

Suis-je poète, ou suis-je sourd-muet ?

Ai-je commis le grand crime de faire du mal aux autres, ou le petit crime de vouloir vivre ma vie en paix, loin des yeux qui jugent ?

Ai-je parcouru le monde à pied, ou suis-je juste un figurant dans sa grande imagination ?

Elle ne le saura jamais, qui j'étais ou quel fantôme du passé que je suis maintenant.

Le noir et le blanc m'ont blanchi, la photographie me garde encore en vie.

Je la hèle, tout comme je hèle les autres,
 d'une époque et d'un lieu il y a longtemps oubliés.

Mais elle ne sentira pas ma sueur, ma saleté, mes joies et mes désespoirs.

Elle ne peut que deviner mes ampoules et mes cors, mes cicatrices que je porte cachées.

Sans doute que j'étais comme elle...
que je suis né au moins d'une femme dans la douleur, 
que j'ai grandi, et que la vie
n'a pas toujours été mon amie.

Ce qu'a vu le pigeon

Pour Mil et une :





Baskets noires, la gloire.
Cardigans. Queues de cheval.
Les années cinquante.

8.2.13

AMOR VINCIT OMNIA

Pour le Défi du samedi :


83379780_o

Il était une fois deux feux d’artifice qui voulaient se marier.

Tout le monde était contre :
Enfin, pas tout le monde.

Les feux de gauche d’artifice comprenaient.

Les feux de droite d’artifice étaient un peu contre, pour la plupart,
seulement à cause de l’argent, mais quant aux raisons morales d’artifice,  ils s’en fichaient un peu.

Mais les feux de l’Église d’artifice étaient contre. 

Ils citaient la Bible d’artifice qui défendait l’amour entre deux feux d’artifice – enfin, la vieille partie - bien que cette même Bible – enfin, la nouvelle partie -  disait que tous les feux d’artifice était des égaux devant les yeux du Seigneur d’artifice, et aussi que ce qu’on faisait au moindre feu d’artifice, on faisait aussi au Seigneur d’artifice.

Beaucoup de temps d’artifice a passé - il y a eu des étincelles -
mais enfin, on a compris que l’important d’artifice, c’est qu’on s’aime, les uns les autres et sans artifice.

C’était alors enfin feu vert.

Et donc les deux feux d’artifice se sont mariés et ils ont fait beaucoup de jolis petits enfants d’artifice.

Et la foule, épatée, a crié :

« QUE C'EST BEAU, DEUX FEUX D'ARTIFICE QUI S'AIMENT!
HOURRAH ! »

7.2.13

Dans la Rue du Beffroi

Pour Mil et une :

Le Beffroi par Martine Richard


Tenir le haut du pavé
un jour de marché
n’est pas une évidence :

les jeunes ne viennent plus,
ils sont tendance superette.

Ces jours-ci,
Ce sont les vieux qui viennent
Trébucher contre
Les pavés
Qu’on ne pense plus à jeter
Comme un regard.

Ils pincent mes tomates.
Ils serrent mes oranges.
Ils repassent juste avant la fermeture
Pour me faire chanter,
Signalant les traces sur les fruits
Laissées par d'autres doigts
Ruinés par l’arthrose,
Et puis ils grommèlent encore
Que je rançonne leurs vivres.

Parfois, j’ai comme une envie féroce
De m’enfuir.

Mais c’est là où je suis né
C’est là où je mourrai
C’est là où j’ai aimé, haï,
Gagné, perdu,
Travaillé, vécu mon vécu.

Dans la rue du Beffroi,
Dans une autre vie,
Lointaine,
J’avais la pêche.

5.2.13

dilemme

Me plaindre de l'égoïsme des autres est preuve de mon propre égoïsme, n'est-ce pas ?

3.2.13

J'ai tellement envie

j'ai tellement envie 
de l'épingler
juste pour entendre
le pop, le sssssssss,
juste pour voir
dégonfler
et repartir 
comme une fusée
molle
ce stupide ballon 


1.2.13

SALVADOR

Pour une consigne chez Annick SB :



Au cinéma de minuit,
la fée carabosse
porte son scarabée doré
comme un maillon manquant.

Sa sempiternelle ritournelle
dans le velours noir
fait pleurer à l'arache-coeur
le valet de pique
sous un soleil de plomb.

Quelle vie de chien
Andalou !